La couverture est très réussie, inquiétante, intrigante – deux petites filles qui se font face, l’une (ou les deux ?) portant un masque – comme un effet miroir… Le double inquiétant (qui est qui ?).
Les critiques sont toutes élogieuses, voilà « un thriller psychologique à vous glacer le sang » nous dit l’éditeur sur la quatrième de couverture. Et en effet, l’idée de départ est très prometteuse.
Un couple, qui vient de perdre dans des circonstances tragiques une de ses filles jumelles, décide de quitter Londres pour s’installer en Ecosse, mais pas n’importe où, sur une petite île (dotée d’une unique maison et d’un phare, tous deux à l’abandon) au large de Skye.
On imagine, immédiatement, le huis clos qui s’ensuivra et qui servira de décor au drame, le deuil de ce couple hanté par la mort de leur fille, et non moins hanté par l’attitude pour le moins étrange de la « survivante ». La petite jumelle, celle qui reste, semble souffrir d’un choc post traumatique, c’est du moins ce qu’ils se disent, parents et médecins, mais peu à peu le doute s’installe, ce fameux doute… Est-elle bien Kirstie, ou n’est-elle pas plutôt Lydia, celle qui est morte ?
« Maman, c’est Kirstie qui est morte, moi je suis Lydia » déclare un jour de but en blanc, la petite gamine.
« Pourquoi tu m’appelles tout le temps Kirstie ? »
Se sont-ils trompés ? Ont-ils déclaré pour morte, celle qui est vivante ? (on aurait presque envie de dire, on en est pas loin, ont-ils enterré la vivante ?)
Mais, il y a pire, la gamine, avec son sourire en coin, parfois, inquiète, angoisse, terrifie presque sa mère (presque).
Les chapitres se succèdent, les uns écrit à la première personne et consacrés à la mère, les autres dévoilant le point de vue du père, mais rédigés cette fois à la troisième personne, créant une sorte de distance entre lui et le lecteur et permettant au doute de s’installer…
Pourquoi a-t-il délibérément choisi cette destination, ce lieu où sa femme serait si isolée ?
« Oui. Isolée, loin de tout. Parfait. Il était heureux d’avoir convaincu sa femme de venir s’installer ici ; heureux d’avoir réussi, en outre à la persuader que c’était son choix. Depuis des mois, il voulait éloigner sa famille de tout, et aujourd’hui il avait atteint son but. Sur Torran Island, ils seraient enfin en sécurité. Personne ne poserait de questions. Il n’y aurait pas de voisins trop curieux. Pas d’amis ni de proches. Pas de policiers non plus. »
Pour un peu, on penserait presque à Shining.
Oui, mais non… Certes, l’histoire est bien goupillée, le suspens est assez bien entretenu (quoique un peu longuet par moments). Malheureusement, je me suis rendue compte en cours de lecture que les critiques que j’avais lues avaient dévoilé à peu près les trois quarts de l’intrigue (et comme il y a peu de rebondissement, le moindre « spoil » est un crime)… Aucune révélation ne m’a étonnée avant le dernier tiers du livre.
J’ai regretté également que le thème de la jumellité n’ait pas été plus développé, plus creusé. Certes, il est au centre de l’intrigue, mais il n’est pas exploité autant qu’il aurait pu. Dommage. Je suis un peu restée sur ma faim.
Certes la chute est retentissante, et le lecteur, au final bien manipulé, ne la voit pas nécessairement venir, mais elle tombe comme un couperet, posant le point final sans avoir été assez « creusée », « exploitée ». Je l’aurais voulu plus psychologique qu’il n’est ce thriller, plus complexe. Le sujet s’y prêtait si bien.
Et puis, il y a le décors, magnifique, l’Ecosse sauvage, la mer, ses îles…
Oui, c’est dommage. Ce livre se lit d’une traite, mais laisse un gout d’inaccompli qui me déçoit.
S.K Tremayne est le pseudonyme, nous dit l’éditeur, d’un auteur britannique à succès. Encore un mystère, qui ne doit pas être très difficile à lever.
Editions Presse de la Cité. Septembre 2015.